Sur le concubinage des prêtres

Publié le par Emmanuel Bozzi

Ce 26 Avril 2006, le prêtre Léon Laclau a reçu sa mutation disciplinaire de la part de l'évêché de Bayonne, pour concubinage affiché. Il refuse de quitter sa paroisse et ses paroissiens font une "grève de messe" pour le soutenir. Ce genre d'incident discrédite une fois de plus la hiérarchie catholique et suscite l'incompréhension parmi ses fidèles. Pourquoi les prêtres n'auraient-ils pas le droit de se marier ?

 Le nouveau pape Benoit XVI a réitéré, le 13 Mars 2007, l'obligation du célibat des prêtres en ces termes : "La vie des prêtres célibataires dans la maturité, la joie et la dévotion et est une bénédiction pour l'Eglise et la société elle-même". Ce n'est donc pas lui qui changera les règles.  

Allons donc droit aux paroles de Jésus.
Exige-t-il le célibat de ses apôtres ? A aucun moment. L'Evangile parle de la belle-mère de Pierre (Matthieu 8:14), preuve qu'il était marié.
Une parole de Jésus donne son avis précis sur la question :
"Car il y a des eunuques qui le sont dès le ventre de leur mère; il y en a qui le sont devenus par les hommes; et il y en a qui se sont rendus eux-mêmes eunuques, à cause du royaume des cieux. Que celui qui peut comprendre comprenne." (Matthieu 19:12) Il y avait donc trois sortes d'eunuques. Ceux qui l'étaient à la naissance; ceux qui l'étaient par les hommes, comme les gardiens de harems que l'on castrait; ceux qui refusaient de se marier pour s'occuper entièrement du royaume de Dieu. Cela fut le cas de Jean-Baptiste, et de l'apôtre Paul par exemple. Mais le célibataire n'est pas plus spirituel ou plus consacré que le marié. Il n'est pas question ici de l'Eglise imposant le célibat aux serviteurs de Dieu. Ce devait être un choix libre.
Dans la société juive, les rabbins étaient tenus d'avoir une épouse.
L'apôtre Paul s'exprime également sur le sujet : "Seulement, que chacun marche selon la part que le Seigneur lui a faite, selon l'appel qu'il a reçu de Dieu. C'est ainsi que je l'ordonne dans toutes les Eglises." (1 Corinthiens 7:17). Si Dieu donne à un homme la capacité de se priver de femme pour servir l'Eglise, qu'il fasse ainsi. Si Dieu le conduit vers une épouse, qu'il se marie. Ce n'est pas à l'Eglise de décider pour vous.
Les évêques du Nouveau TEstament étaient mariés afin d'être de meilleurs serviteurs de l'Eglise : "Il faut donc que l'évêque soit irréprochable, mari d'une seule femme, sobre, modéré, réglé dans sa conduite, hospitalier, propre à l'enseignement." (1 Timothée 3:2) Plus loin, il précise : "Il faut qu'il dirige bien sa propre maison, et qu'il tienne ses enfants dans la soumission et dans une parfaite honnêteté; car si quelqu'un ne sait pas diriger sa propre maison, comment prendra-t-il soin de l'Eglise de Dieu?" (v.4-5)

Alors, comment en est-on arrivé au célibat obligatoire des prêtres ?

- C'est à partir du 4e siècle que le célibat des prêtres commence à faire débat. C'est en effet à cette époque qu'apparaissent les premiers moines, ces ascètes qui fuient dans les déserts la débauche des villes pour se consacrer à la prière. Notons que Jésus n'a jamais demandé une pareille chose puisqu'il envoie ses disciples "dans le monde" (Jean 17:18).
- Les Constitutions Apostoliques et les Canons permettaient à des hommes mariés de devenir prêtres et de rester mariés. Mais ils commencèrent à interdire le mariage aux prêtres.
- Au IVe siècle encore, de grands évêques étaient mariés : Grégoire de Naziance (330-390), Grégoire de Nysse et Synesius. Ceux-là étaient des hommes très respectables et fidèles à leur femme. Mais il vînt plus tard des papes moins respectables qui eurent des enfants illégitimes : Jean XI (931-935), par ex., était le fils de Serge III (pape de 904 à 911) avec sa maîtresse Marozia.

On sait malheureusement quels fruits honteux le célibat forcé des prêtres a porté.
Au VIIIe siècle, Saint Boniface visitant l'Allemagne, rend compte des horreurs qu'il voit au pape Zacharie (741-752) : "Les jeunes hommes qui passent leur jeunesse à commettre des viols et des adultères montent dans les rangs du clergé. Ils passent leurs nuits avec quatre ou cinq femmes à la fois et se lèvent le matin... pour célébrer la messe..." Aux XVe et XVIe siècle, la ville de Rome était réputée pour la débauche de son clergé. Savonarole, le réformateur catholique de Florence fustigeait le clergé romain dont "la piété consiste à passer leurs nuits avec des prostituées". Sur une population de 90.000 âmes environ, il y avait à Rome près de 7000 prostituées enregistrées (elles devaient payer une taxe à l'église pour exercer). La chapelle Sixtine doit son nom au pape Sixte IV (pape de 1471-1484). Il est celui qui instaura une taxe pour les prêtres qui entretenaient une maîtresse.
Mais le scandale perdure. L'année 2002 fut pour le Vatican l'année de tous les scandales aux Etats-Unis. Après la moisson de plaintes devant les tribunaux, on estime que 11.000 enfants ont été molestés par les prêtres américains ! Plusieurs paroisses ont fait faillite à cause des dommages-intérêts faramineux versés aux familles.

Alors pourquoi le pape Benoit XVI persiste-t-il ? Pourquoi le Vatican reste immuable sur cette question ? Pourquoi est-il prêt à perdre des millions de dollars en procès, des milliers de fidèles dégoûtés et des centaines de vocations découragées ? Pourquoi aucun pape ne veut-il entendre la souffrance des "femmes de prêtres" comme celles de l'Association Plein Jour ?
- Le Vatican a répondu 
dans son Directoire pour le ministère et la vie des prêtres, en ces termes : "L’Église exige le célibat ecclésiastique pour que le prêtre se donne généreusement au Seigneur; il est libre d’aimer totalement son unique épouse, l’Église, et de se dévouer pour elle. Le prêtre prolonge le Christ et suit son exemple. Par son célibat, le prêtre annonce le Royaume à venir."  (Le célibat sacerdotal § 57-60; 31 janvier 1994).
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Dans le dogme catholique, le prêtre est l'incarnation du Christ auprès des fidèles : il révèle, confesse, absout, etc. Si le prêtre peut se marier, il quitte cette fonction de médiateur entre Dieu et les hommes; il n'est plus "christique". Je veux bien comprendre ce raisonnement, mais cette notion de "prêtre-Christ-médiateur" est-elle conforme à la Parole de Dieu révélée aux apôtres ?
Non. Christ n'a pas besoin de médiateur ni de prêtre : il demeure le chef de l'Eglise (Colossiens 1:18); Christ est lui-même l'unique médiateur entre nous et Dieu (1Timothée 2:5); son sacerdoce de prêtre n'a été transmis à personne puisqu'il est toujours vivant pour l'exercer : "Mais lui, parce qu’il demeure éternellement, possède un sacerdoce qui n’est pas transmissible. C’est aussi pour cela qu’il peut sauver parfaitement ceux qui s’approchent de Dieu par lui, étant toujours vivant pour intercéder en leur faveur." (Hébreux 7:24-25).

Pour conclure, la Parole de Dieu nous met en garde contre ceux qui interdisent le mariage : “l’hypocrisie de faux docteurs portant la marque de la flétrissure dans leur propre conscience, prescrivant de ne pas se marier...” (1 Timothée 4:2-3). Rien ne justifie le célibat des prêtres et tout contredit cet usage dogmatique de l'Eglise. La seule raison non officielle de conserver cette obligation est de garder les prêtres totalement dépendants et seuls face à leur hiérarchie. Un prêtre chef de famille deviendrait soudain trop indépendant et surtout transmettrait son héritage à ses enfants et non à l'Eglise...

Publié dans regardbiblique

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